" Assise dans mon fauteuil, je fume cigarette sur cigarette. Sans hâte. J'ai mon temps, tout mon temps. Car je sais enfin ce que je veux. Je veux le néant."
Jean Rhys, l'une des plus grandes romancières de son temps, est morte le 14 mai 1979, à près de quatre-vingt-dix ans. Elle travaillait depuis environ quatre ans à cet ouvrage autobiographique qui n'avançait qu'avec une extrême lenteur à cause de sa fragilité physique.
Elle parvint à mener les quinze brefs chapitres décrivant son enfance au point où la perfectionniste qu'elle était pût les considérer comme achevés. Ils racontent son histoire jusqu'au moment où elle quitta l'île de la Dominique, aux Antilles, où elle était née, pour aller poursuivre ses études en Angleterre.
"Je suis retournée m'asseoir dans mon fauteuil. J'ai regardé l'arbre. Il y avait de petits paquets, accrochés à toutes les branches, dans des papiers d'or et d'argent. je crois qu'il y avait aussi des ampoules, des boules lumineuses, enfin tout, absolument tout, jusqu'à une immense étoile d'argent plantée au sommet. J'ai regardé l'arbre longtemps. J'ai essayé d'imaginer une soirée, avec des gens autour de moi, beaucoup de gens qui rient, qui parlent, qui sont heureux. Mais à quoi bon? Jamais cela n'arrivera, je le sais au plus profond de moi. Jamais je ne ferai partie de quoi que ce soit. Jamais je n'appartiendrai à quoi que ce soit, où que ce soit, je le sais, et toute ma vie se passera ainsi, à essayer d'appartenir, à essayer en vain. Il y a toujours quelque chose qui tourne mal. Je suis une étrangère. Je le serai toute ma vie."
C'est une lecture théâtralisée que la Scène Déménage vous propose samedi 19 mars 2016 (voir tous les détails ci-dessous), par la comédienne Nathalie Andrès, de la compagnie An-na de Toulouse.
Voici ce qu'elle nous dit de ce texte :
« J’étais très jeune quand j’ai lu "Souriez s’il vous plaît". Il y a des lectures qui enrichissent votre imaginaire, qui vous font vous évader de votre quotidien et il y a des lectures qui vous marquent pour la vie, qui font votre éducation en quelque sorte. Pour moi Jean Rhys a complété mon éducation, a affiné mon regard sur le monde. Sa nette préférence pour les faibles et ceux qui ont le dessous me touche particulièrement. « La juste moyenne détruit l’âme » : la finesse et la force de son écriture tient à sa grande capacité d’analyse d’elle‐même – son regard sans concession sur la société et en même temps son humanité infinie.
Pour moi Jean Rhys a complété mon éducation, a affiné mon regard sur le monde. Sa nette préférence pour les faibles et ceux qui ont le dessous me touche particulièrement. « La juste moyenne détruit l’âme » : la finesse et la force de son écriture tient à sa grande capacité d’analyse d’elle‐même – son regard sans concession sur la société et en même temps son humanité infinie.
Malgré les obstacles, et ils ont été nombreux, malgré le fait d’être tombée dans un oubli total pendant trente ans – certains la croyaient morte – elle est restée fidèle à elle‐même et à son écriture. Je l’admire pour cela.
Il y a très longtemps que je tiens à faire une lecture de textes de Jean Rhys. Aboutir à un spectacle et incarner ses mots a un sens très intime pour moi et rend justice à son œuvre trop peu connue de la plupart des lecteurs alors qu’elle est un grand écrivain, reconnue par les plus grands critiques. Pour la comédienne que je suis devenue, ses textes sont des bijoux discrets et précieux sans aucun clinquant. Ses mots pénètrent dans votre âme et vous éclaboussent le cœur. »
DÉTAILS PRATIQUES
Samedi 19 mars 2016
Chez Françoise BOURGON et Marie DUPEYRON
556 chemin d'Arcet
40500 MONTAUT
tél. : 06.19.21.70.63
Accueil : 17h30
Lecture : 18h
À l'issue, grignotage et papotage de vos petits plats.
Tarif : 12€, 10€ adhérents.
Réservation indispensable au numéro indiqué
ou à
La Scène Déménage :
courriel : lascened@gmail.com
Tél. : 05 35 37 20 38